Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
22 May

Hommage à Mohamed Haroun - Masin U Harun (13 avril 1949 -  22 mai 1996 ): un pionnier et une figure emblématique du combat Amazigh.

Publié par Amnay At Qassi

🛑 Hommage à Mohamed Haroun - Masin U Harun (13 avril 1949 -  22 mai 1996 ): un pionnier et une figure emblématique du combat Amazigh.

➖On dit souvent que le vrai héro c'est le peuple, mais il ne faut pas oublier que ce peuple tire son héroïsme de l'héroïsme de ceux qui l'éveillent à l'instar de Masin u Harun. 

ll était un militant incorruptible, un érudit engagé, un homme exemplaire qui est décédé dans la pauvreté mais dans la dignité. 

Même si aucune institution étatique ne porte son nom, Masin u Harun bénéficie  aujourd'hui de la meilleure des reconnaissances, celle de son peuple, le peuple pour qui il a légué un combat, un socle de valeurs et une oeuvre scientifique qui ont inscrit son nom dans le patrimoine universel.

Nous, en tant que nouvelle génération, nous puisons dans son héroïsme le courage, la détermination et la clairvoyance qui nous permettront dans relever tous les défis pour faire triompher ses idéaux qui sont aussi ceux de tous les kabyles dignes.➖

Bouaziz Ait Chebib, porte-parole de l'URK

🆕 Biographie :

Mohamed Haroun ou Masin U Harun est né le 13 avril 1949 dans le village Tifrit à Akbou (Bgayet-Kabylie), fils du sergent Tahar , mort durant la guerre d’Algérie en 1958 et de Bessai Zahoua, morte dans un accident de la circulation en voulant rendre visite à son fils emprisonné à Lambèse, à Batna.

À 11 ans, il a commencé ses études primaires dans un camp militaire français puis il a été admis à la pépinière des enfants de chouhada de bir lahrech à Setif. Sa brillance et son génie ont permis de faire trois classes en une seule année ensuite il a été orienté vers le collège d’enseignement technique d’El-Eulma où il fait 7 km à pied. Au CNET De Sidi-Aich il a eu son CAP d’ajusteur avec la meilleure note.

Au lycée technique de Dellys, il a obtenu un brevet de maîtrise (Bm) et son bac technique en 1968 ce qui lui a permis de s’inscrire à la faculté centrale d’Alger, filière science exactes. Il étudiait aussi l’astronomie à l’observatoire de Bouzaréah. En parallèle, il faisait de la recherche sur la langue amazigh.

Un brillant parcours, des études prometteuse, son itinéraire était semé de subtilité, plein de contrainte, car il croisait souvent ce qu’il abhorrait, l’injustice, l’iniquité qui l’ont poussé à la révolte.

➖➖ Son combat
Il commence son combat (d'abord identitaire) en étant maître d'internat au lycée de Dellys, où il essaie de sensibiliser les élèves sur la question berbère. Les coopérants égyptiens se réunissent pour exiger son expulsion de l'établissement.

Plus tard, avec d'autres militants dont Smaïl Medjeber, il participe à la création des revues Itij (Le Soleil) et Taftilt (Eclat lumineux) en langue berbère. Les militants qui distribuent cette revue risquent de se faire arrêter par la Sécurité militaire (SM), mais ils ne baissent pas les bras puisque peu de temps après ils relancent « l'Organisation des Forces Berbères »[2] ainsi que la revue Athmaten (Les Frères) liée à ce mouvement; dès lors, Haroun et ses compagnons radicalisent leur combat.

Le 3 janvier 1976, une bombe explose dans les locaux du journal El Moudjahid et une autre, au tribunal militaire de Constantine ; ces deux bombes sont posées respectivement par Hocine Cheradi et Mohamed Haroun. Une troisième bombe devait cibler le tribunal militaire d'Oran, mais le poseur, Smaïl Medjeber, est interpellé par la Sécurité militaire (SM) avant de pouvoir accomplir sa mission[3].

➖➖ Arrestation
Haroun est arrêté le 5 janvier 1976 alors qu'il dînait au restaurant universitaire. Il est mis dans un véhicule banalisé et conduit jusqu'au niveau de l'Établissement national de télévision et est transféré dans un fourgon blindé et transporté jusqu'à un lieu inconnu pour y subir un interrogatoire musclé.

Il est présenté à la Cour de Sûreté de l'État de Médéa le 2 mars 1976, où il écope de la réclusion à perpétuité. À l'issue de ce procès, il est incarcéré à la prison de Tazoult, Lambèse à Batna, où il purge onze ans de peine jusqu’à ce qu'il soit libéré le 5 mars 1987. Il racontera[4] par la suite qu'il a subi des tortures et l'isolement et que ses geôliers voulaient le faire passer pour un traître à la nation et son père pour un harki. En prison, Il passe l'essentiel de son temps à étudier le français, l'arabe, l'espagnol, l'anglais et, secrètement, il continue ses recherches en linguistique berbère. Il écrit plusieurs poèmes dont Avrid n Tlelli (le chemin de la liberté) et Monsieur le Président que Lounès Matoub a repris en chanson.

➖➖ Poursuite du combat identitaire après sa libération : 

Le 5 juillet 1987, à l'occasion de l'anniversaire de l'"indépendance nationale", Mohamed U Harun bénéficia de la grâce présidentielle et retrouva les siens qui l'ont accueilli en héros. La joie était mitigée car sa mère n'était pas là pour lui donner l'accolade. Elle était morte, quelques années auparavant, dans un accident de la circulation survenu alors qu'elle était en route vers Tazoult afin de rendre visite à son fils. Qu'à cela ne tienne ! En homme libre, sans s'accorder un temps de répit, il reprit son bâton de pèlerin et s'en aIla prêcher la bonne parole libératrice. Infatigable, ce symbole légendaire du combat libérateur se dépensait à fond dans le mouvement associatif. C'est lui qui disait : “La langue amazighe n'est pas un dialecte archaïque qui ne mérite, comme on le croit généralement, aucune considération, mais un chef-d'œuvre linguistique qu'il faut à tout prix développer et promouvoir. Un jour, le Nord-africain sera, j'en suis sûr, fier de sa langue.”

➖➖Il décède le 22 mai 1996 après une longue maladie: 

Marié le 6 août 1992, Masin U Harun ne verra pas ses enfants grandir. 

Atteint d'une tumeur au cerveau, il sentait sa fin prochaine. N'empêche que sa ferveur ne s'en trouvait guère altérée. Son cas s'aggravait de plus en plus. Il a tenu le coup, jusqu'au 22 mai 1996, jour où il a tiré sa révérence en léguant à la postérité des recueils de poésie, un essai de traduction du Coran, des travaux scientifiques dont un ordinateur manuel, des ouvrages sur la grammaire et des tableaux de peinture. Ce farouche défenseur de la cause berbère a laissé une veuve et deux orphelines sans ressources. Mohamed Haroun s'en est allé par la grande porte. Il était le parfait exemple du militant intègre et son itinéraire se confond avec l'histoire de la lutte identitaire. Tous ses rêves sont en passe de devenir réalité. Le passage sur terre de ce monument regorge de leçons à même d'abreuver les générations montantes. Son combat se trouve désormais inscrit au Panthéon de notre histoire. Eh, oui ! les héros ne meurent jamais, disait l'autre.

🆕 Sources: 

https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Mohamed_Haroun

https://www.liberte-algerie.com/actualite/mohamed-haroun-la-force-de-conviction-6682